29 mai 2010

douche froide


Avec les Omni le 15 mai dernier devant le squatt 59Rivoli, 
après leur présentation (© Dani Voirin)

C'est fou comme le temps court : on a le temps, rien ne presse, et soudain les circonstances changent, et les souvenirs deviennent comme caduques.
Il y a à peine dix jours, les Omni étaient à la maison, une semaine de folie, trois représentations dans la capitale, beaucoup de corre corre et de joie.
Puis on les a laissés au train qui les emmenaient à Barcelone, où les attendaient d'autres représentations. De là ils chercheraient le moyen de rester encore quelques semaines en Europe pour continuer à se produire partout où des amis pouvaient les accueillir et leur trouver des scènes (et en quinze ans d'existence et de création, ils ont des amis partout).
Mais tout s'est accéléré, impossible de prolonger le visa Schengen, retour à Cuba. Bon.
Et là, leur mail tout à l'heure sur mon écran, premières nouvelles depuis leur retour, mauvaises nouvelles...
A leur arrivée à l'aéroport de La Havane, tout leur a été confisqué : ordi, disque dur, appareils photos, les films de leurs présentations, leurs poèmes, leurs mails, tout est sous séquestre...
En ouvrant leurs valises, les douaniers ont trouvé dans leurs affaires des CD avec des documentaires, sur les Dames en blanc, sur les rappeurs underground. "Oooh, c'est du lourd !" a commenté une douanière en voyant ça.
Tout a été confisqué pour 30 jours, le temps pour la seguridad del estado de mener l'enquête. Mais quelle enquête ? Que s'agit-il de montrer ? Qu'ils pensent différemment ? Qu'ils sont libres en esprit et en action ? Est-ce vraiment à prouver ? Et après, quoi ?

Au même moment, j'apprends que Sonia, l'ex-femme de Reinaldo, a été menacée au Venezuela, où elle vit depuis le début des années 1990. Je l'avais rencontrée quand elle était revenue à Cuba pour la première – et seule – fois, en 2005 je crois, pour l'anniversaire de la fille qu'elle a eu avec Reinaldo. On avait fait la fête au 14e étage, chez Yoani et Reinaldo. Normal. 
En janvier dernier, à Caracas où elle vit, à l'occasion d'un rendez-vous administratif, des policiers, dont un cubain, lui ont demandé pourquoi elle était allée chez Reinaldo, qui fréquentait la maison, quels opposants, etc. Comme elle leur répondait qu'elle n'en savait rien et que ça ne les regardait pas, un des gars l'a menacée : "Et bien, tu devrais faire attention dans les rues, avec toute l'insécurité qu'il y a au Venezuela..."
Elle est rentrée effrayée chez elle. Quelques temps plus tard, au consulat cubain où elle faisait les démarches pour aller à La Havane faire connaissance avec ses deux petites-filles, on lui a dit de revenir pour un rendez-vous avec le consul. Elle a préféré s'abstenir. Elle a quitté le Venezuela, depuis fin mars elle vit à Bogota, et se sent en danger. 
Mécanique oppressante, dispositif menaçant, faire peur aux gens, où qu'ils soient, et affaiblir indirectement ceux qui sont réellement visés... qué feo... quelle laideur...

13 mai 2010

Les OMNI débarquent à Paris !!!


¡ Ñoooo ! Todavía no lo puedo creer !!
C’était pas gagné, mais ça a marché : les OMNI vont débarquer (enfin, trois d'entre eux, le quatrième n'a pas eu le permis de sortie de l'île).

Pour les parisiens qui seraient curieux de voir en vivo les happenings déjantés et féconds des Omni – Zona Franca (dont je vous avais parlé ), ils seront à Paris cette semaine.
Trois dates :
Le samedi 15 mai à 18h, au squatt 59Rivoli (59 rue Rivoli, 75001 Paris ; métro Chatelet)
Le mardi 18 mai à 20h, au Bab-Ilo (9 rue du Baigneur, 75018 Paris ; métro Jules Joffrin)
Le mercredi 19 mai à 19h30, à La Pêche (16 rue Pépin, 93100 Montreuil ; métro Mairie de Montreuil)
Profitez-en, je ne sais pas quand on aura la chance de les revoir par ici !
J'y serai les trois soirs. Nos vemos.
Comme on dit dans l'île, "¡ a bailar y a gozar con la Sinfónica nacional !"

13 janvier 2010

ayiti chérie


Adjabel, Deux béquilles

Je pense à Herns, à Atissou, à Vincenzo, eux je suis presque sûre qu'ils sont loin de là. Mais leurs familles, leurs amis, leurs voisins, tous les autres... 
Quelle horreur.
Année sinistre.

06 janvier 2010

fin décembre/début janvier

Comme au bon vieux temps ! Accueillir le premier janvier en lançant un seau d’eau par la fenêtre en compagnie des potes cubains : ça faisait longtemps que ça ne m'était pas arrivé, et finalement ça me manquait. Ce fut une très belle fête, un tourbillon, jusqu'à l'aube, chaleureux malgré les -10° dehors, avec en plus le cadeau inattendu d’y retrouver Patxi, dansant comme un cabri malgré son genou en mousse, entraîné là par l’ami au chapeau de paille.
Compétitions de rhums añejos cubazuéliens, danses et décadence, amigos queridos d'ici et d'ailleurs, l’année 2010 commençait bien, vraiment.

Et là, cinq jours plus tard, la disparition de Lhasa me laisse chancelante, vidée, triste. Envie d’entendre de nouvelles chansons d’elle, de la voir chanter sur scène (on la dit si menue et si intense), de continuer à la découvrir au fil du temps. Je ne l'imagine pas partie.
Dix ans que sa voix m’accompagne, ancrée dans ma vie, La Llorona qui passait en boucle à l’été 1999 sur la platine du salon familial, avec le Voisin et les amis chiliens récemment rencontrés, The Living road emmené à Berlin lors de retrouvailles avec l’Aigle, et ce dernier album que je ne connaissais pas et que je découvre seulement maintenant
Je l'écoute, voix chaude qui m'enveloppe et me réchauffe, m'apaise, si familière.
Lu sur un blog québecois ce témoignage qui me rend sa disparition encore plus vive :
« Elle avait 23 ans. Moi aussi. Dans son petit appartement mal éclairé de la rue Clark, nous avions parlé de musique. De la sienne, de celle de Tom Waits, des tziganes et de Violeta Parra. Nous nous étions découvert un intérêt commun pour la poésie de Vladimir Vissotski.
Elle souriait constamment d'un sourire mélancolique. Les lèvres serrées, secrètes. Son rire était profond, éclatant, comme sa voix riche, éthérée, incandescente. Ses silences étaient fréquents. Sages, réfléchis. Une vieille âme au regard mutin de jeune fille éternelle. Mystérieuse comme son passé. Diaphane. Sauvage. Je suis tombé sous le charme. Je le suis toujours resté.
»

Pour ceux qui ne les connaissent pas encore, quelques liens pour écouter Violeta, bouleversante (Rún rún et Volver a los 17), et Vissotsky l'écorché (Plus rien ne va, en français, et en russe, ou encore celle-ci sur la rue de son enfance. Et toutes les autres aussi).

Et d'ailleurs, en pensant à Lhasa, cette chanson de Vissotsky, La fin du bal :