Pour le plaisir, voici un texte satirique bien écrit et bien vu, tiré du blog Mi isla al mediodia. Je le traduis pour ceux qui ne lisent pas l’espagnol; pour les autres, c’est là.
"
ACCES LIBRE
Le Ministère de l’informatique et des communications (MIC) a eu la gentillesse de m’envoyer cet avis :
"Dans l’objectif de satisfaire la demande croissante de notre peuple pour l’accès à internet, notre ministère a envisagé la création d’un plan spécial pour développer et promouvoir l’usage public d’internet dans notre pays. Ce plan porte le nom d’Inter-rien.
Dans notre ministère, nous sommes parfaitement conscients de l’importance de l’accès d’internet mais nous savons aussi que c’est une erreur d’ignorer les dangers que contient son usage. C’est pour cette raison qu’il a été décidé que dans un premier temps, l’accès public à internet serait ouvert seulement à certains secteurs déterminés de la population, pendant une certain temps. Au terme de cette période aura lieu l’évaluation du succès obtenu et des problèmes éventuellement rencontrés. Après la réalisation des modifications nécessaires commencera une seconde étape, qui concernera l’ensemble de la population.
Pour la composition du groupe initial, nous avons cherché un échantillon suffisamment hétérogène, afin de garantir la représentativité de l‘ensemble de la population cubaine.
Le groupe initial concerne tous les citoyens cubains, résidents à Cuba, qui sont inclus dans l’une des catégories suivantes :
- Vétérans de la première guerre mondiale
- Travailleurs participant au projet cubain d’exploration de la planète Mars
- Sportifs et entraîneurs ayant participé aux derniers Jeux Olympiques d’hiver
- Survivants du Titanic
- Lauréats du prix Nobel, quelle que soit la catégorie
- Retraités de 65 ans ou plus, en bonne santé, capables de courir le 100 mètres en moins de 11 secondes (épreuve exigée)
- Adolescents (âgés de moins de 15 ans) qui peuvent réciter par cœur un fragment de plus de 20 pages du chef-d’œuvre de Karl Marx : Le Capital (le choix du fragment est libre, tant que la longueur est respectée)
- Femmes au foyer diplômées du BEPC qui peuvent démontrer avoir lu Ulysse de James Joyce et A la recherche du temps perdu de Marcel Proust (il faudra démontrer la lecture des deux œuvres, épreuve écrite).
Il existe de plus l’intention d’inclure dans ce premier groupe les personnes qui peuvent prouver avoir vu tous les programmes de la «Mesa Redonda» diffusés jusqu’à ce jour. Ces personnes doivent être en bonne santé psychologique et ne présenter aucun trouble neurologique (certificat médical exigé, et vérification des connaissances par des questions au hasard sur l’émission).
Comme vous pouvez le voir, ce groupe initial permet une haute représentativité de tous les secteurs de la population (étudiants, travailleurs, intellectuels, scientifiques, sportifs, retraités, et femmes au foyer), ce qui entraîne une garantie du succès du projet.
Révolutionnairement,
José Papillon Varela
Sous-secrétaire du bureau du Ministre pour les réseaux, les câbles, et autres nœuds.
Mesa Redonda : programme d’information et de «débat» politique qui est diffusé (et rediffusé) quotidiennement par la télévision cubaine. C’est le programme où tous peuvent exprimer librement ce qu’ils pensent de George W. Bush.
"
Edit : à propos de cette obsession de la forme dans la revendication de tous les secteurs de la société, cet article, ce matin, dans Granma, fait lui aussi le tour de la question dans son premier paragraphe (… et peuple en général).
14 avril 2007
05 avril 2007
badinage
Le feu vient de passer au rouge, je m'arrête. Devant moi un vieux side-car soviétique, un homme au volant, un autre assis dans le «panier».
Il fait chaud, nous sommes en milieu d’après-midi, comme d'habitude une file de femmes plus ou moins jeunes attend sur le côté, et se précipite vers les véhicules à peine arrêtés —les auto-stoppeuses.
Une femme d'une cinquantaine d'années se dirige vers la première voiture de la file, sans succès. Elle s’approche alors du conducteur du side-car, lui demande probablement s’il va dans sa direction; je ne sais pas ce qu’il lui répond mais elle éclate de rire, relève un peu sa jupe et s’assied en amazone derrière lui.
A côté, l’homme dans le panier du side-car lui lance un mot, elle se retourne vers lui, se penche, lui murmure quelque chose à l’oreille, maintenant c’est à son tour à lui de rire.
En quelques minutes, le temps d’un feu rouge, ces trois-là, parfaits inconnus, se sont inventés une connivence, une proximité, ils rejouent une fois de plus le plaisir de la rencontre et de la séduction sous les tropiques.
Un chercheur cubain avait consacré toute une étude au "choteo" insulaire, entre badinage et moquerie. Selon lui, c'était un des traits caractéristiques de ses compatriotes.
Cette familiarité à portée de main, qui ne dure que le temps d’un trajet, d’une attente devant un magasin, qui tisse le temps qui passe, c’est peut-être l’une des choses les plus surprenantes pour un étranger, les plus fascinantes aussi.
Une vie au jour le jour, où le lendemain n’existe que vaguement, de façon diffuse, où l’heure qui vient, la minute qui vient, comprend tous les possibles.
Il fait chaud, nous sommes en milieu d’après-midi, comme d'habitude une file de femmes plus ou moins jeunes attend sur le côté, et se précipite vers les véhicules à peine arrêtés —les auto-stoppeuses.
Une femme d'une cinquantaine d'années se dirige vers la première voiture de la file, sans succès. Elle s’approche alors du conducteur du side-car, lui demande probablement s’il va dans sa direction; je ne sais pas ce qu’il lui répond mais elle éclate de rire, relève un peu sa jupe et s’assied en amazone derrière lui.
A côté, l’homme dans le panier du side-car lui lance un mot, elle se retourne vers lui, se penche, lui murmure quelque chose à l’oreille, maintenant c’est à son tour à lui de rire.
En quelques minutes, le temps d’un feu rouge, ces trois-là, parfaits inconnus, se sont inventés une connivence, une proximité, ils rejouent une fois de plus le plaisir de la rencontre et de la séduction sous les tropiques.
Un chercheur cubain avait consacré toute une étude au "choteo" insulaire, entre badinage et moquerie. Selon lui, c'était un des traits caractéristiques de ses compatriotes.
Cette familiarité à portée de main, qui ne dure que le temps d’un trajet, d’une attente devant un magasin, qui tisse le temps qui passe, c’est peut-être l’une des choses les plus surprenantes pour un étranger, les plus fascinantes aussi.
Une vie au jour le jour, où le lendemain n’existe que vaguement, de façon diffuse, où l’heure qui vient, la minute qui vient, comprend tous les possibles.
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