Non, je ne vais pas parler des fêtes de Pâques, parce qu’ici, c’est un week-end comme un autre, avec juste un petit chemin de croix autorisé par les autorités, par-ci par-là.
Donc, voici plutôt des nouvelles de l’art contemporain cubain, en ces temps de biennale : il y a eu il y a quelques semaines un « cabaret » organisé dans le Salon rosado de La Tropical. D’habitude, ce lieu est le temple de la salsa, où un public de mala fama vient passer ses soirées en dansant en plein air, et en buvant du rhum chispa de tren vendu en monnaie nationale (on le voit dans Suite Habana, le documentaire de Fernando Perez).
Mais ce soir-là, le public est différent, entre artistes branchés et étudiants désoeuvrés. Au programme : une succession de numéros, les uns musicaux, les autres vidéos, agrémentés de quelques happenings sur scène.
Ca commence fort : un groupe de punk rock cubain, déguisé avec d’énormes masques, étripe un chat sur scène, et s’enduit de son sang (des amis m’ont dit que c’était un lapin : le doute persiste, de loin, je n’ai pas bien identifié la bestiole).
Un peu plus tard, sur l’écran vidéo, projection d’un court-métrage d’une Dominicaine, intitulé « Betty enjoyed it too ». Apparaît Betty Boop, accompagnée d’une musique guillerette. L’amie cubaine qui m’accompagne est ravie, elle n’a jamais vu de dessin animé de Betty Boop en entier, me dit-elle.
Oui, mais voilà, rapidement l’image de Betty Boop se dilue en transparence, et durant cinq minutes, l’on voit surtout un film porno amateur projeté comme en fond d’écran.
A Cuba, depuis 47 ans, la pornographie est interdite, et dûrement sanctionnée par la loi. Voir des images porno, qui plus est en public et sur grand écran, est plutôt déstabilisant, et carrément transgressif.
Pour rester dans la transgression, un peu plus tard, une jeune femme, cubaine, arrive sur scène, s’installe de profil à une table posée là, et commence à manger une énorme platée de nourriture, en silence, longuement. Tout le monde la regarde, les uns font des commentaires sur ce qu’elle mange, d’autres se rappellent qu’ils ont faim et en font des blagues.
Quand la jeune femme termine son assiette, après une bonne dizaine de minutes, elle attache ses longs cheveux, se tourne vers le public, et commence à vomir, tout simplement. Elle vomit presque aussi longtemps que le temps qu’elle a pris pour manger. Puis elle se lève et s’en va.
J’avais été surprise de ces quelques morceaux visuellement choquants, mais il y a quelques jours, je suis allée voir une chorégraphie de danse moderne au Théâtre national.
A la fin, les danseurs s’installaient sur des chaises face à un écran. Une vidéo de cinq minutes nous montrait alors l’égorgement d’un cochon de lait, le bouillonnement du sang jaillissant de sa gorge en gros plan, et les mouvements frénétiques de ses petites pattes. Quelques minutes plus tard, sur la scène les danseurs réapparaissaient avec une assiette à la main. Ils mangeait, puis se penchaient sur de petits seaux posés à côté d’eux, et vomissaient.
Mort, sang, vomissement, sexe. Ca doit être ce qu’on appelle une tendance…
15 avril 2006
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