Moi non plus, il y a trois semaines, je ne savais pas ce qu’était un pitcher, un nocaút (knock out), un jonron (home run), un hit, un faul, bref, j’étais ignare en béisbol (base-ball).
Oui mais voilà, à Cuba, c’est justement le base-ball le sport national, et avec le tout premier tournoi mondial professionnel -auquel Cuba a eu in extremis le droit de participer—, c’est même devenu le sujet de conversation national.
Et hier, Cuba s’est qualifiée pour la finale, face au Japon.
En cours de route, les stars du base ball que sont les Américains, les Portoricains, les Dominicains… toutes ces équipes ont été éliminées, pour une finale Cuba-Japon, qui a surpris pas mal de monde. A commencer par les 42 000 spectateurs du stade de San Diego, Californie, dont les billets avaient été vendus des mois à l’avance pour venir soutenir l’équipe nationale américaine, quasi-assurée de la victoire. Tout ça pour se retrouver face aux Cubains (aux Cubains !) et aux Japonais.
Ici, ça a été la surprise générale, même si très vite les médias officiels ont sauté sur l’occasion pour faire de ce parcours victorieux la preuve de la supériorité du sport national, et par là même du système.
J’étais juste un peu surprise du peu de réaction populaire spontanée, vu l’enjeu sportif : lors de la demi-finale hier, difficile de trouver un endroit public où voir le match, même en petit comité.
Et après la victoire, pas de grande liesse, de manifestation de joie dans les rues, juste quelques hourras isolés.
Même Granma, le journal du Parti, a eu du mal à justifier son titre : «Cuba entière est en fête». Les acrobaties rhétoriques sont fréquentes dans ce journal, mais là, ça m’a paru vraiment fascinant : « La classification de Cuba à la grande finale du premier Tournoi Mondial de Baseball a suscité dans l’île une démonstration d’euphorie (…). Dans la rue centrale 23, dans le Vedado, on a ainsi pu entendre des coups de klaxon de la part de voitures qui passaient par là ».
Des coups de klaxon… évidemment, tout est relatif, mais je me souviens des images montrant un million de personnes sur les Champs Elysées au moment de la victoire à la coupe du monde de football en 1998, et je trouve que des coups de klaxon pour fêter une victoire inédite depuis 47 ans, ça fait un peu juste.
D’autres personnes m’ont dit qu’il y avait eu quelques rassemblements dans la Vieille Havane, à Santiago, à Holguin. Mais il n’empêche : cette anémique réaction populaire montre à quel point les Cubains ne descendent pas spontanément dans les rues, au contraire. Tout le monde regardait le match chez soi, tout le monde était ravi de la victoire de l’équipe nationale, le sport est l’un des meilleurs prétextes pour faire la fête, ici comme ailleurs; malgré tout ça, rien, ou si peu.
Je trouve que c’est intéressant sur ce que ça dit des « manifestations spontanées », et des grands rassemblements de masse qui réunissent des centaines de milliers de personnes, eso sí : sur convocation des autorités exclusivement.
19 mars 2006
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